Norman Cliff (1893-1977)

Publiés en 1988 , onze après la mort de l’auteur, ces mémoires adoptent un point de vue pacifiste. Journaliste, Norman Cliff a été toute sa vie un pacifiste militant. Il a notamment été l’ami de Gandhi.

La boue et la colère

En 1914, Norman Cliff quitte son récent poste de journaliste au Torquay Time pour s’enrôler dans les Grenadier Guards. Il prend part aux batailles de la Somme et de Passchendaele, et décroche la Médaille Militaire pour sa vaillance au combat. Après l’Armistice, il est engagé au News Chronicle, au poste de responsable éditorial pour les affaires étrangères. A la fin des années 30, il milite ouvertement pour le pacifisme. En 1946, il devient correspondant en Inde et se lie d’amitié avec Gandhi.  

To Hell and back with the Guards paraît en 1988, onze ans après sa mort. Ces mémoires, préfacés par l’ancien Premier ministre Harold Wilson, ont clairement pour objectif de dénoncer la guerre. Le regard porté sur la réalité des combats est sans concession. Comme ce fut le cas pour un certain nombre d’auteurs, Norman Cliff adopte d’emblée un point de vue que l’on peut qualifier de pacifiste. Son témoignage a pour but premier de faire prendre conscience à ses lecteurs de la nécessité à oeuvrer pour l’amitié entre les peuples.

En 1915, Norman Cliff arrive au centre d’entraînement des Guards à Caterham, où des sergents-majors aboient leurs ordres du matin au soir. L’objectif est clairement d’humilier les jeunes recrues pour les transformer en combattants aguerris. Les mémoires de Stephen Graham attestent également de la brutalité qui régnait dans cette caserne, surnommée à juste titre La Petite Sparte. Comme les Grenadier Guards servent régulièrement de sentinelles à la famille royale, ils subissent une seconde période de formation, à Chelsea, qui a pour but de polir leurs manières.

            Pour décrire les combats et la vie dans les tranchées, Cliff recourt à un langage rude, reflet fidèle de la façon qu’avaient les combattants de s’exprimer. L’écriture tardive de ces mémoires alliée au point de vue pacifiste pourrait nous faire craindre une déformation des faits et un parti pris qui nuirait à l’objectivité du récit. Il n’en est rien. La première phrase de l’ouvrage donne le ton : Comme nous étions naïfs ! Le point de vue est d’emblée rétrospectif. Dans sa préface, l’auteur précise : J’ai essayé de créer un récit simple dans une langue se voulant aussi proche que possible des faits évoqués. Étant journaliste – et optimiste – j’avais à l’époque pris des notes sur nos actions militaires ainsi que sur les conversations que je jugeais reproductibles à l’écrit.

Le passage qui suit évoque une réalité que l’on retrouve dans tous les mémoires : la boue. Elle a été un ennemi au même titre que les balles et les obus, et a parfois tué. L’été et l’automne exceptionnellement pluvieux de 1917 ont transformé le saillant d’Ypres en un immense bourbier qui ralentissait fortement tout mouvement de troupes. Le bilan de la bataille de Passchendaele s’élève à 250 000 pertes britanniques, dont au moins 40 000  portés disparus, le plus souvent noyés dans la boue. Ces chiffres justifient amplement la référence à l’enfer présente dans le titre des mémoires de Norman Cliff.

TOMMIES 14-18

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