Joe Ackerley (1896-1967)

« Les copains qui s’en sont allés »

           

Critique littéraire influent, pionnier de la BBC, auteur, défenseur de la cause homosexuelle, Joe Ackerley a tenu dès les années 1920 une place de premier plan dans le monde des lettres britannique. Engagé au début de la guerre, il a été blessé plusieurs fois, a perdu des amis et son frère au combat avant d’être fait prisonnier. Ce parcours de guerre douloureux l’a profondément marqué.

Après avoir échoué à l’examen d’entrée de Cambridge, Joe Ackerley s’engage dans l’armée et devient sous-lieutenant dans le régiment de l’East Surrey. Envoyé en France en juin 1915, il est blessé le 1er juillet 1916 dans la Somme. Après six heures d’attente dans un trou d’obus, il est secouru par des brancardiers et évacué en Angleterre. Ce même jour, il perd son grand ami Bobby Soames, tué au cours de l’offensive. De retour au front, il est promu capitaine et compte son frère aîné, Peter, parmi les hommes qu’il a sous ses ordres. En février 1917, Peter est blessé. Joe ne le reverra jamais car de retour en France après sa convalescence Peter sera tué en août 1918. Cette mort hantera Ackerley toute sa vie. En mai 1917, il mène une contre-attaque à Cerisy. Touché à la cuisse, il doit à nouveau attendre des heures avant d’être secouru sur le champ de bataille au milieu de soldats morts ou agonisants. Ce sera finalement un brancardier allemand qui le transportera au poste de secours. Devenu prisonnier de guerre, Ackerley est acheminé dans un hôpital à Hanovre. En sa qualité d’officier, il est envoyé dans un camp suisse, où les conditions de vie ne sont pas trop sévères. Il ne sera rapatrié en Angleterre qu’une fois la guerre terminée.

            Malgré une expérience de guerre particulièrement douloureuse, Joe Ackerley ne reviendra que peu par écrit sur ces années sombres. Il écrira toutefois une pièce basée sur son vécu de prisonnier, Prisoners of War, qui connaîtra le succès en 1925. En 1932, il rédigera une préface pour Escapers All, recueil de quinze récits d’évasion de camps de prisonniers pendant la Grande Guerre.

           On ne peut parler d’Ackerley sans évoquer son homosexualité, qu’il affichait ouvertement dès les années 20, fait assez rare à une époque où elle tombait encore sous le coup de la loi. En 1923, il trouve un emploi de secrétaire en Inde auprès d’un maharadja grâce à son ami E.M. Forster, qui vient de publier La Route des Indes. Le récit de son séjour indien, Hindoo Holiday, est très critique envers les colons britanniques même si le ton se veut léger. L’environnement indien lui permet toutefois de vivre plus librement son homosexualité qu’en Grande-Bretagne.

            Ayant rejoint les rangs de la toute jeune B.B.C. en 1928, il dirige la revue éditée par la radio : The Listener. Critique littéraire influent, il n’hésite pas à prendre la plume pour exposer les tares de la société britannique, comme en 1942 quand il dénonce la répression dont les homosexuels font l’objet dans une lettre au Spectator. Après la Seconde Guerre mondiale, il se consacrera principalement à l’écriture. Son oeuvre est éclectique et comprend de nombreux essais, un roman et une biographie d’E.M. Forster. Son autobiographie, My Father and Myself, publié en 1968, est peut-être son livre le plus étonnant. L’histoire de la liaison de son père et la découverte, à la mort de celui-ci, de l’existence de trois demi-soeurs déterminera une part importante de sa vie.

Poème écrit en mémoire de Bobby Soames, tué au combat le 1er juillet 1916 :

TOMMIES 14-18

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