Ivar Campbell (1890-1916)

Attaché honoraire à l’ambassade britannique de Washington, il est refusé deux fois par les centres de recrutement mais finit par se faire engager. Après une période en France, il est envoyé sur le front oriental et meurt sur les berges du Tigre.

Lettres d’un aristocrate écossais

Né en 1890 dans une famille de l’aristocratie écossaise, Ivar Campbell partage son enfance entre le château d’Argyll et la résidence familiale de Londres. Après des études au collège Christ Church d’Oxford, le petit-fils du 8e duc d’Argyll voyage en Europe et apprécie particulièrement Venise et Paris, où il séjourne quelque temps. Il devient ensuite attaché honoraire à l’ambassade britannique de Washington de fin 1912 à mars 1914. Tout en exerçant sa mission diplomatique, il s’intéresse aux institutions américaines. Il est particulièrement impressionné par la vitalité démocratique de ce pays qui à bien des égards s’oppose au milieu aristocratique de sa naissance.

            De retour en Grande-Bretagne, il projette d’ouvrir une librairie à Chelsea, où il compte vendre des livres et des dessins de jeunes artistes. Il écrit aussi des poèmes, dont certains seront publiés dans des périodiques. Ses talents poétiques ne font aucun doute. Les influences élisabéthaines se fondent avec subtilité dans une forme moderne, avec une technique qu’il maîtrise parfaitement. Il excelle également dans l’art de la nouvelle et de l’essai. La note fantastique y est régulièrement présente. En fait, Ivar Campbell aime l’expérimentation. Il cherche sa voie en s’essayant à différentes formes d’écriture. Si en 1914 il n’a qu’une idée vague de l’avenir, il apparaît cependant certain que son champ d’action sera la littérature. L’ensemble de ses écrits, poésie et prose, sera publié par sa famille et ses amis après sa mort, en édition privée.

            Quand la guerre éclate, il se porte immédiatement volontaire mais les médecins du centre de recrutement refusent de l’incorporer. Il apprend alors à conduire une ambulance et part pour la France avec la Croix-Rouge américaine. . De retour en Grande-Bretagne, il essaie à nouveau de se faire enrôler dans l’active. Le refus qu’il essuie une seconde fois ne le décourage pas. La troisième tentative sera la bonne. En février 1915, il obtient un brevet d’officier dans le régiment de son clan, les Argyll et Sutherland Highlanders. Pendant la période d’entraînement, il se donne corps et âme à sa nouvelle vie militaire et commande avec enthousiasme à ses compatriotes écossais. Malheureusement, il sera versé dans le régiment des Seaforths quand il débarquera en France.

            Les lettres qu’il écrit du front sont d’un style remarquable. A la fois lyriques et descriptives, elles constituent une sorte de journal de bord où il rend compte des événements du front tout en les commentant. La sincérité, voire la candeur, de ses réflexions aboutit à un ton que l’on ne trouve que rarement dans les lettres de combattants. La fantaisie n’y est jamais absente. Son obsession à montrer que la guerre est une réalité naturelle va à l’encontre de la représentation habituelle que l’on a du combattant. Ceci ne l’empêche pas pour autant de dénoncer la folie des dirigeants politiques et des généraux.

            Après une période où il forme les jeunes recrues à l’art de lancer les grenades, il est envoyé en Mésopotamie, où le corps anglo-indien combat la sixième armée ottomane. La guerre y est très différente de ce qu’il a vécu sur le front occidental. Pas de tranchées figées pour mille ans dans cette région, mais des batailles rangées plus classiques avec avancées et retraites, comme dans les conflits d’avant 1914. A ce stade de la guerre, il a plus ou moins décidé de rester soldat toute sa vie mais le 8 janvier 1916 il est tué par balle en conduisant ses hommes à l’assaut d’une position turque pendant la bataille de Sheikh Saad, sur les berges du Tigre.

Extraits :

TOMMIES 14-18

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