David Jones (1895-1974)

Auteur de In Parenthesis, une œuvre moderniste, complexe et incantatoire, David Jones a voulu écrire des mémoires qui tranchent avec la production standard générée par le genre

Guerre et mythologie

Peintre, graveur sur bois et poète, David Jones publie en 1937 un livre relatant son expérience de combattant : In Parenthesis. Associant prose et poésie, cette œuvre se différencie des autres mémoires de combattants par la modernité de son style et ses perspectives mythologiques. Elle n’en constitue pas moins un témoignage d’une grande force, où le vécu des combattants est présenté avec une originalité qui apporte des éclairages inédits sur la réalité de la guerre.

Né en 1895 dans le Kent au sein d’une famille galloise, David Jones montre très tôt des talents exceptionnels pour le dessin. A l’âge de 14 ans, il réussit à persuader ses parents de le laisser quitter le système éducatif classique pour intégrer la Camberwell Art School, où il découvre les œuvres des impressionnistes et des préraphaélites.

Quand la guerre est déclarée, il s’engage dans les Royal Welsh Fusiliers et se bat sur le front occidental de 1915 à 1918. Simple soldat, il survit au premier jour de la bataille de la Somme mais est blessé à la jambe onze jours plus tard au cours de l’attaque sur le bois de Mametz. De retour sur le front en octobre, il doit être évacué en février 1918 suite à un accès de « fièvre des tranchées ».

Dans les années 20, il devient peintre et graveur sur bois. Converti au catholicisme en 1922, il fait partie d’une guilde, basée sur le modèle des confréries du moyen-âge, et établit des rapprochements entre la mythologie galloise et le post-impressionisme. Il vit seul, souvent dans la pauvreté, souffrant d’insomnie récurrente et de périodes de dépression. David Jones consacre sa vie entière à son œuvre et participe à de nombreuses expositions. Intéressé également par l’écriture, il envisage dès la fin des années 20 de publier ses mémoires de guerre. Il ne le fera qu’en 1937. La lente gestation du livre s’explique par la nature même du projet, exigeant et ambitieux. David Jones veut associer son expérience des tranchées à un ancien poème gallois écrit au VIe siècle. Tout comme l’a fait James Joyce avec Ulysses, l’objectif est de mettre en parallèle le présent et un passé mythique. T.S. Eliot salue la publication d’In Parenthesis et considère David Jones comme un poète majeur.

Œuvre complexe et incantatoire, où la prose et la poésie, l’ancien et le moderne, s’entremêlent constamment, In Parenthesis est d’une lecture difficile. Cette épopée moderniste, qui tranche radicalement avec la production standard générée par le genre, a le mérite de présenter l’expérience du combattant sous une forme nouvelle et d’ouvrir des perspectives inédites en matière d’écriture testimoniale. On reproche régulièrement à la littérature de témoignage le classicisme des formes qu’elle adopte et un style convenu. Il n’en est rien avec In Parenthesis, œuvre audacieuse, qui a le mérite de sortir des sentiers battus.

L’extrait qui suit nous donne un aperçu du style de David Jones. On y trouvera une liste des différents sujets de conversation abordés par les combattants.

Extrait :

TOMMIES 14-18

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