Charles Scott Moncrieff (1889-1930)

Le futur traducteur britannique de Marcel Proust s’est battu trois ans au sein des Kings Own Scottish Borderers. Blessé à la bataille d’Arras, il boitera toute sa vie.

En cantonnement

Principalement connu pour avoir traduit l’œuvre de Marcel Proust en anglais, Charles Scott Moncrieff est né à Weedingshall, en Écosse. En 1903, il intègre le lycée de Winchester et publie en 1908 une nouvelle dans le New Field, revue littéraire dont il est l’éditeur et qui sera  interdite suite à cette publication.  La nouvelle en question traite de l’homosexualité au sein d’un établissement scolaire réputé et de l’hypocrisie avec laquelle les autorités éducatives réagissent face aux orientations sexuelles de leurs élèves. Le texte sera à nouveau publié en 1923 dans le cadre d’une édition privée.

            Après Winchester, Scott Moncrieff entre à l’université d’Édimbourg, où il poursuit un double cursus de droit et de littérature anglaise. En 1913, il décroche une bourse qui lui permet de se spécialiser dans les études anglo-saxonnes, axées sur la littérature médiévale. Pendant son séjour à l’université, il rencontre Philip Bainbrigge, qui publiera par la suite des odes à l’amour uranien et sera tué à Épehy en septembre 1918. Le terme uranien était utilisé au début du siècle pour désigner ceux dont la sexualité n’était pas exclusivement hétérosexuelle.

            En août 1914, Scott Moncrieff devient sous-officier dans le régiment des Kings Own Scottish Borderers et se bat sur le front occidental de 1914 à 1917. Il se convertit au catholicisme en France en 1915. Il ne sera pas le seul combattant protestant à devenir catholique. Roland Leighton, parmi d’autres, fera un choix similaire. Après la guerre, des anciens combattants tels que David Jones et Siegfried Sassoon se convertiront également. L’exemple des aumôniers catholiques, plus proches des combattants que leurs homologues protestants, y est sûrement pour beaucoup. Le 23 avril 1917, Scott Moncrieff est gravement blessé suite à une explosion d’obus au cours de la bataille d’Arras. S’il évite l’amputation, sa jambe gauche ne se rétablira jamais complètement et il boitera jusqu’à sa mort.

            Après une longue période d’hospitalisation, Scott Moncrieff travaille pour le ministère de la guerre tout en écrivant des articles pour le magazine littéraire New Witness. Au mariage de Robert Graves, en janvier 1918, il rencontre le poète-combattant Wilfred Owen. Séduit par le jeune officier et ses talents de poète, il essaie de lui obtenir une affectation sur le sol britannique mais sans succès. A la mort d’Owen, en novembre 1918, Siegfried Sassoon et Osbert Sitwell lui en veulent de ne pas avoir su protéger leur ami. Les poètes des tranchées ne forment pas un cercle structuré mais les liens qu’ont noués un certain nombre d’entre eux aboutissent toutefois à un semblant de communauté.

            Au début des années 20, Scott Moncrieff devient secrétaire personnel d’Alfred Harmsworth, propriétaire du Times. En 1923, sa santé l’oblige à s’installer en Italie, où il partage son temps entre Florence, Pise et Rome.

            Le premier volume qu’il traduit de l’œuvre de Proust paraît en 1922. Sur son lit de mort, le romancier français lui a écrit une lettre pour le féliciter de sa traduction, déplorant toutefois le choix du titre, Remembrance of Things Past, emprunté à un sonnet de Shakespeare, qui ne rend pas l’ambivalence du titre français, A la recherche du temps perdu,  le mot perdu ayant ici deux sens possibles. En 1930, Scott Moncrieff commence à traduire le dernier volume de la Recherche mais ne peut le terminer. Il meurt à Rome cette même année. L’association des traducteurs britanniques décerne chaque année un prix portant son nom.

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WE’RE in billets again, and to-night, if you please,

I shall strap myself up in a Wolsely valise.

What’s that, boy ? Your boots give you infinite pain ?

You can chuck them away : we’re in billets again.

We’re in billets again now and, barring alarms,

There’ll be no occasion for standing to arms,

And you’ll find if you’d many night-watches to keep

That the hour before daylight’s the best hour for sleep.

We’re feasting on chocolate, cake, currant buns,

To a faint German-band obbligato of guns,

For I’ve noticed, wherever the regiment may go,

That we always end up pretty close to the foe.

But we’re safe out of reach of trench mortars and snipers

Five inches south-west of the  » Esses  » in Ypres ;

Old Bob, who knows better, pronounces it Yper

But don’t argue the point now you’ll waken the sleeper.

Our host brings us beer up, our thirst for to quench.

So we’ll drink him good fortune in English and French :

Bob, who finds my Parisian accent a blemish,

Goes one better himself in a torrent of Flemish.

It’s a fortnight on Friday since Christopher died,

And John’s at Boulogne with a hole in his side,

While poor Harry’s got lost, the Lord only knows where ;

May the Lord keep them all and ourselves in His care.

. . . Mustn’t think we don’t mind when a chap gets laid out,

They’ve taken the best of us, never a doubt ;

But with life pretty busy and death rather near

We’ve no time for regret any more than for fear.

. . . Here’s a health to our host, Isidore Deschildre,

Himself and his wife and their plentiful childer,

And the brave aboyeur who bays our return ;

More power to his paws when he treads by the churn !

You may speak of the Ritz or the Curzon (Mayfair)

And maintain that they keep you in luxury there :

If you’ve lain for six weeks on a water-logged plain,

Here’s the acme of comfort, in billets again.


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