Arthur Heath (1887-1915)

Jeune enseignant à Oxford, Arthur Heath s’engage dès le mois d’août 1914. Tué à Vermelles en octobre 1915, il a laissé des lettres qui seront publiées en 1917. Elles reflètent souvent des préjugés de classe et nous renseignent sur le regard que portaient les officiers sur les hommes du rang.

« Il y a des jours où les hommes devraient être nés sans mères. »          

La réponse d’Oxford et de Cambridge à l’entrée en guerre de la Grande-Bretagne a été immédiate. Nombre d’étudiants qui s’apprêtaient à entamer leurs études universitaires en septembre ont préféré prendre la direction des centres de recrutement. Les étudiants de première, deuxième ou troisième année attendront pour la plupart quelques mois avant de s’engager. Le corps professoral est également concerné. Plusieurs jeunes professeurs choisiront de se battre malgré l’incitation de l’État à ne pas le faire. Arthur Heath fait partie de ceux-là. Ayant terminé son cursus en 1909, il avait étudié un an en France et en Allemagne avant d’intégrer l’année suivante l’équipe enseignante d’Oxford en qualité de tuteur. Il s’engage le 7 août 1914. Après une longue période d’entraînement dans toute une série de camps en Angleterre, il part pour le front.

           Les lettres du lieutenant Arthur Heath sont celles d’un homme cultivé qui refuse l’anti-germanisme primaire et ne s’attarde que très peu sur les aspects les plus horribles de la guerre, préférant une distance teintée d’ironie. Toutefois, le propos peut se faire acerbe. Tout l’art britannique de l’euphémisme est ici employé avec maestria.  « Il y a des jours où les hommes devraient être nés sans mères, » écrit-il au détour d’une lettre. Si les lettres d’Arthur Heath sont brillantes, objectives et d’un intérêt évident, aussi bien du point de vue historique que littéraire, elles ne sont pas pour autant exemptes de préjugés de classe. Bien qu’ayant des sympathies de gauche, il n’hésite pas à juger sévèrement le regard que porte le simple soldat sur la guerre et sa façon d’exprimer ses idées et sensations. Chargé comme beaucoup d’officiers de lire le courrier de ses hommes, il décide d’écrire lui-même une lettre sur le modèle de celles des hommes du rang et de l’envoyer à un ami. Le but est de se moquer du style réaliste et de la pauvreté d’expression qui en découle. Ce genre d’attitude reflète une certaine arrogance sociale ou culturelle à laquelle sont enclins certains officiers, même s’ils n’en sont pas toujours conscients. Dans les régiments les plus prestigieux, il peut même exister une ségrégation entre officiers en fonction de leurs origines et de leurs études. Si ces attitudes étaient gommées dans la conduite même de la guerre, elles reprenaient le dessus quand il s’agit d’admettre de nouveaux membres dans les associations d’amis du régiment et autres coteries à caractère élitiste.

           Arthur Heath meurt le 8 octobre 1915 près de Vermelles. Comme pour de nombreux autres combattants tombés à la bataille de Loos, son corps ne sera pas retrouvé. Son nom est aujourd’hui honoré sur le mémorial de Loos. Ses lettres sont éditées en 1917 dans un recueil préfacé par Gilbert Murray, qui a été son professeur puis son collègue à Oxford, et auquel la lettre qui suit est adressée. L’essai qu’Arthur Heath avait écrit juste avant la guerre, The Moral Social Significance of the Conception of Personality, sera quant à lui publié en 1921.

Extraits :

TOMMIES 14-18

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