Robert Furley Callaway (1872-1916)

Un aumônier à la baïonnette

Né en 1872 dans le Kent, Robert Furley Callaway étudie à Oxford avant d’être admis à l’institut théologique de Wells en 1895. Il devient diacre en 1896. Ordonné prêtre l’année suivante à Kaffraria, il se marie et occupe différentes missions apostoliques en Afrique du Sud, jusqu’en 1914, date à laquelle il repart en Angleterre avec son épouse suite à des problèmes de santé.

            Quand la guerre éclate, il ne parvient pas à obtenir un poste d’aumônier et s’engage dans le R.A.M.C. (corps médical de l’armée). Après avoir rejoint le camp d’Aldershot pour y suivre un entraînement, il est toutefois nommé aumônier d’un hôpital situé à proximité. Il rejoint ensuite le front, où il est attaché à la 2nde division de cavalerie, stationnée à Ypres. Bien qu’âgé de 43 ans, Robert Callaway souhaite faire partie des forces combattantes. Il veut partager le même sort que les hommes dont il a la garde spirituelle. Après une période de formation en Angleterre, il obtient un brevet d’officier dans le régiment du Staffordshire. Devenu sous-lieutenant, il meurt en essayant de secourir un sergent blessé sous le feu nourri des mitrailleuses allemandes, le 13 septembre 1916, dans la Somme. Son corps est enterré dans le cimetière Guillemont Road à Guillemont. En 1917, une sélection de ses lettres sera éditée sous le titre Letters from two Fronts. R. F. Callaway, Mission Priest – A selection of his letters from South Africa, 1900-1914, and from France, 1914-16.

Extrait :

A sa femme                                                                     2 septembre 1916

… Avant de se mettre en marche hier, l’ensemble de la brigade s’est rassemblé dans un champ de blé pour écouter le cours de maniement aux armes donné par un commandant écossais. Il fut excellent, mais pour ma part, son intérêt ne résidait pas tant dans l’instruction en elle-même que dans sa visée : la conversion radicale de notre état d’esprit à l’échelle d’une nation tout entière. Il nous enseigna la meilleure façon de tuer (avec la baïonnette) et tous les procédés qui s’étaient avérés utiles depuis le début de la guerre pour tuer le plus d’Allemands possible. En écrivant la chose, cela paraît d’une brutalité sans nom, mais hier il n’y eut pas un soldat ou un officier présent qui ne fût convaincu de la nécessité à se battre dans le but de tuer. C’est la seule façon de gagner la guerre. Personnellement, je frissonne encore à l’idée d’enfoncer vingt centimètres d’acier froid dans le corps d’un homme ou de recevoir sa baïonnette dans mon ventre, mais ce qui me fait frissonner n’est que l’instinct naturel de répulsion, commun à tous les hommes, du moins ceux ayant une éducation. Je ne frissonne pas à l’idée qu’un prêtre puisse commettre ce genre d’action. Je n’ai jamais regretté d’être devenu un combattant. D’une certaine façon, je peux dire avec saint Paul : « Je me glorifierai de mes faiblesses ». Je suis fier de ces choses que les autres estiment dégradantes pour quelqu’un dans ma position : j’ai été rétrogradé en quittant mes fonctions d’aumônier, je me retrouve sous les ordres de garçons de dix-huit ans, je dois faire des marches interminables


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